Mémoires du Donjon
Situé à mi chemin, mon séjour à T.de décembre 2009 fut le point d’orgue de notre année amoureuse, et en l’espace de quatre jours seulement, nous avons vécu et provoqué les évènements les plus incongrûment opposés en apparence, mais qui ont formé à eux tous une harmonie délicieuse et inoubliable.
Il y eut d’entrée l’après midi parfaite au donjon (voir Douce Punition) absolument fluide, à la fois drôle, sensuelle et émouvante, même si elle fut un peu .. éprouvante, puis une séance de bondage dans la grande et belle chambre de mon hôtel tranquille, avant l’amour, ensuite cette deuxième balade au Mont Faron, teintée d’érotisme et d’inquiétude dans un cadre grandiose, et enfin, ce dernier jour, une rencontre avec un couple « candidat » très bien élevé, dans un café du port, et l’impression réelle qu’on était devenus, nous aussi, un « couple », grâce à ce semblant d’échange social « autour d’un café ».
Entre temps, le matin, je me baladais dans la région proche, tu me guidais parfois par Sms, et j’ai découvert grâce à toi des lieux charmants, dans la splendeur de cette fin d’automne où l’été s’attardait encore.
Mais c’est la promenade sur le Mont que je vais raconter. Une fois de plus, jamais deux sans trois !
Tu étais venu me chercher en début d’après midi, nous avions déjà fait l’amour et bien plus la veille et l’avant veille et tu m’offrais cette balade semblable à la précédente certes, mais avec le secret espoir, en plus, d’ajouter une nouvelle polissonnerie, cette fois en pleine nature, chose qui t’a toujours fasciné et que tu n’as jamais osé faire en dehors des sentiers balisés ..
Comment suis je habillée cette fois ? une jupe courte brochée marron et noir, mon petit haut Morgan un peu décolleté, à manches trois quart, ajusté et que j’aime beaucoup, des bottes lacées et des bas top opaques noirs. Toi c’est simple, tu as ton uniforme presque immuable, jean noir et chemisette blanche, et ton blouson en cuir.
Nous reprenons la route que je connais déjà un peu, heureux de ce que nous avons déjà vécu, autrement dit un bonheur sans nuage d’être ensemble, mais je sais maintenant que c’était pour toi le maximum supportable et compatible avec ta conscience et ton emploi du temps.
Mais à l’époque, il n’y a pas encore un an, j’étais loin de l’imaginer, pour moi aussi, ces quelques jours étaient sans questions, sans nuages, surtout que j’avais déjà passé deux fois une semaine du coté de chez toi, en se voyant un jour sur deux ; je ne savais pas que j’étais en train de vivre nos dernières vraies « vacances », tous les autres séjours faits ensuite n’excédant jamais deux nuits, et te voir deux fois.
Cette fois nous allons directement boire le café dans ce que je nomme déjà « notre bar », cet immense endroit qui domine la rade à 650 mètres d’altitude, davantage désert qu’en octobre car nous sommes cette fois les seuls clients !
On s’installe encore sur la terrasse, la température le permet, la lumière automnale est toujours aussi douce, encore un peu plus nimbée, délayée dans l’azur de l’horizon lointain.
Je me demande si le patron nous reconnaît, peut etre ? j’aime ces bonnes habitudes, et je reviendrais bien chaque fois, ici, avec toi.
D’ailleurs, quelque chose me trouble soudain. Nous parlons de voyages à ce moment là et derrière ton visage à contre jour, c’est étrangement le visage de G. qui remplace le tien, j’ai une impression très étrange de flash back et l’espace d’une seconde, je me demande avec lequel je suis, toi ? lui ?
Sans doute notre façon de deviser en confiance, peut etre une vague ressemblance, lui aussi était brun, le visage allongé aux traits marqués, lui aussi portait souvent une veste de cuir et sa voix elle aussi me ravissait ..
Avec ce premier homme, nous sortions souvent dans le même café, aussi, et nous y échangions tellement, avec le même enthousiasme un peu retenu, puis débridé soudain ..
Je m’éveille de ce rêve bref mais étonnant, je ne t’ai rien dit, pour ne pas rompre le charme .. Et pourtant, cette superposition inattendue me semble de bonne augure, et me semble un gage de durée, d’intimité.
Durée ? Et pourtant voilà que tu abordes (ou moi ?) LE sujet qui fâche : notre inévitable séparation, un jour ou un autre.
Voilà que tu en parles, (mais pourquoi donc ?) que tu rends réel cette terrible échéance que je suis incapable de situer. Légère, mais première blessure .. Qui a le plus à perdre ?
« Oh, cela se passera forcément dans le drame « me dis tu, fataliste.
Je ne sais que répondre, je veux alléger le débat, j’ai envie d’etre heureuse … Ne gâche pas ce bel après midi je t’en prie !
Pour faire diversion, j’entreprend de nous prendre en photo, comme le font les amoureux : l’un des deux prend tant bien que mal la photo des deux visages rapprochés, parfois rieurs ou grimaçants, poseurs, ou pas .... La première me semble pas mal, et je continue et j’ai plaisir à voir que tu te prêtes au jeu !
Le soleil commence à décliner sur l’horizon poudreux, il est temps de partir car bientôt il doit aller chercher son fils au lycée.
Mais avant .. je sens qu’une petite idée lui trotte dans la tête, c’est au ralenti qu’il aborde la descente vers la ville, et peu après le sommet oblique soudain vers un sentier forestier qui s’enfonce ensuite sous les pins .. Il n’y a pas âme qui vive, juste quelques voitures qui ne s’attardent pas, en contrebas, une fois que tu m’as entraînée sous le couvert du bois.
Je te sens hésitant, troublé, séduit en même temps, et j’en profite pour pousser mon avantage et raviver mes souvenirs coquins ! entreprenante, je te frôle et ne peut que constater ton désir naissant, il ne m’en faut pas plus pour m’enhardir, et tu ne te fais pas prier !
Je te prends dans ma bouche, l’arme absolue, tu cesses bientôt de regarder fiévreusement de tous cotés, j’aime cette communion avec la nature, l’humaine et la végétale, une sorte de breuvage fort, pour moi !
Puis tu me demandes de quitter ma petite culotte et m’appuies contre un tronc d’arbre, et comme tout à l’heure, tu prends des photos, incorrigible voyeur !
Tu me baises, mais ne conclus pas .. dans un premier temps, surprise, je le prend un peu mal ! Serais tu avare de ton corps ? Pour qui te gardes tu ?
Mais l’amour insouciant est le plus fort, je réplique en m’emparant à mon tour de l’appareil, et je prends une nouvelle série de nos visages, forestière cette fois, un peu plus déjantée, une série que j’adore, tout comme l’autre !
Photos, amour volés .. qu’importe, je suis heureuse, heureuse !! Tu as encore faim de moi, toujours !
Nous dévalons le sous bois pour regagner la voiture, excités et joyeux, tu me promets de revenir encore, mieux et plus longtemps, puis me fais part de tes soucis, les ombres qui vont sans doute, un peu plus tard, rendre notre relation plus difficile : le départ d’un associé qui modifie ton emploi du temps, il y aura des jours où tu seras ailleurs, et moins de soirées où tu seras seul au bureau, une seule par semaine au lieu de deux ou trois ..
Je prends note, mais c’est encore loin, après les vacances de Noël encore presque un mois !
Juste avant tu pars à Lisbonne avec un couple d’amis. Tu sais quoi ? j’avais depuis longtemps envie de connaître cette ville au bord de l’océan, et j’irai dans tes pas, un peu plus tard, en février, et entre temps bien sur .. "on se reverra". (les trois mots magiques, le sésame ..)