Mémoires du Donjon
Et ça continue ainsi, les jours se suivent et n'apportent rien d'autre qu'une petite moisson d'anecdotes bien neutres et de photos des cimes himalayennes. Aucune photo de toi, avec ou sans bonnet de montagne!
Pas de réponse à ma question "quand est ce qu'on se fait un petit msn ?" (ma dernière audace!)
Sauf que .. vendredi soir, non seulement j'ai eu les photos promises, mais .. je le vois non plus rester hors ligne, mais se connecter en vert à msn ... J'attends de longues minutes. Sans doute va til vite se remettre hors ligne ..
Mais non. Je clique ailleurs, je reviens, toujours en vert.
Alors je risque "hello!" (je n'ai rien trouvé de plus original). Il aurait pu commencer.
Et aussitôt je suis informée qu'il est en train de m'écrire un message. Mon coeur bat la chamade, je suis comme tétanisée ..
Pas de quoi pourtant, ceci est la version live de nos précédents échanges. Si ce n'était pas triste au fond, je rirais de voir la différence avec "avant" (pourquoi cet avant et cet après ? qu'y a t il eu entre les deux ? Je me prends la tête depuis trois mois à me poser la question ..)
Et pourtant, je retrouve son style, sa "voix", mais tous ces interdits incongrus qui changent tout .. nous bloquent dans ce bavardage de salon!
Combien de temps ? je ne sais plus, ni ce qu'on s'est dit de banal.
Il ne prend pas de mes nouvelles, ni de mon moral, ni de ma voiture, il s'en fout.
Depuis septembre, je ne recopie plus ni les mails, ni les msn. Ils n'en valent plus la peine!
D'ailleurs, meme le dossier photo de mes dernières "vacances" honteusement écourtées, je ne l'ai pas classé dans le dossier "Toulon", pas appelé "Septembre 2010" - pourtant c'était le premier septembre où l'on se voyait (il ne reste plus que novembre et on est déjà le .. 14!!) : non, ce dossier cafardeux n'a pas sa place dans le long catalogue des jours heureux. Comme si je craignais qu'il ne le contamine.
Il s'appelle tout simplement "Toulon the last". Vous voyez que je reste lucide ..
Un peu avant 20 h, le rituel est le meme pourtant : "je dois descendre" (le "bébé" en moins!)
Je sais qu'ensuite il remonte (vers 21h15) et la plupart du temps nous reprenons la conversation, mais cette fois, je joue son jeu et lui dit :
"bon week end alors"!
"Bon week end à toi aussi"
"Oh tu sais, je fais comme je peux"
Ce fut ma seule faiblesse. Il ne relève pas, mais il reste connecté un long moment, je m'imagine qu'il attend une suite, un aveu, mais je ne peux rien dire, je suis déjà muette de saisissement, que ça finisse, mais aussi que ça aie eu lieu. Enfin, au bout de six semaines!
La dernière fois, c'était pour renouer, on était encore bien dans les temps, à peine trois semaines ! il m'avait dit ces joyeuses insanités qui ne me choquaient meme plus du style "ma queue sera à toi" .. "sèche tes larmes, je préfère tes larmes du bas" et autres sottises qui me faisaient rire.
Puis il s'était défaussé et depuis ne s'est plus départi de cette mortelle froideur.
Et là, son icone s'estompe, ça y est, il est hors ligne et descendu. Je ferme les yeux, je revois les escaliers .. est il passé par le balcon interieur ? ou le grand escalier 19e ?
Aussitot, je pleure comme une fontaine, je sanglote, impuissante devant le silence revenu de mon ordinateur. Maudite invention!
(tu suffoques tu sanglotes et tu pleures .. mais tes larmes n'y pourront rien changer .. car tu m'en as trop fait ..")
Sauf que moi je n'ai rien fait, enfin que je sache .. J'existe depuis trop longtemps, c'est tout ?
Je mange des oeufs au plat, j'en attend un réconfort qui ne vient pas. Je dois meme me forcer, la bouche pleine, tout en continuant de pleurer.
Le soir, je dois consoler en plus (toujours sur msn )ma fille ainée qui a des problèmes similaires aux miens, sauf que son homme à elle ne l'a jamais aimée, la zappait le plus possible, ne lui a écrit que des sms légers, et qu'elle s'obstine sans raison. Elle ne me réconforte jamais elle, contrairement à sa soeur cadette. Elle se pose toujours les memes questions sans comprendre que rien ne sera possible et que jamais rien n'a eu vraiment lieu.
Si bien que je me couche tard, très tard .. encore plus déprimée et malheureuse.
Je subis le contrecoup du choc ressenti. Dans le noir, soudain j'ai très froid.
Le radiateur n'est pas éteint pourtant, il fait doux. Mais je grelotte, au point que j'ai du mal à me lever pour mettre mes chaussettes en peluche, à me saisir du plaid marron et bleu sur lequel nous avons fait l'amour pour la dernière fois, et que je n'ai pas voulu laver .. et qui repose au pied de mon lit..
Je me lève avec des gestes saccadés. Je vois mes mains qui sont secouées de spasmes incontrolables, je grelotte et frissonne, j'ai vu un jour ma mère prendre ce genre de "crise de nerfs" ? moi jamais.
ça dure un bon moment. Je n'arrive pas à me controler, je me sens ridicule à etre secouée ainsi comme un pantin, je pleure et gémis dans la cuisine où j'essaie de porter un verre d'eau à mes lèvres.
je suis malade. Ou folle ?
Mais je finirai par me recoucher, toujours drapée dans le suaire de notre amour défunt.
J'échafaude dans le noir des plans tout aussi fous les uns que les autres : supplier qu'on me prenne à la Salette meme pendant la fermeture de l'hiver, louer une cabane ou une caravane dans quelque endroit désert et sans le moindre ordinateur en vue, et pire encore, louer un mois à la résidence Laura Lisa de la Valette, comme c'était initialement prévu (un mois! il n'a pas tenu 8 jours!!) et une fois la bas, faire comme si, mais me confier à la gentille gérante, lui dire que je viens ici en pélerinage, juste pour voir du pays, et qui sait un jour, l'appeler ..
Le sommeil sera long à venir, ne pas pouvoir compter sur la solution de me donner du plaisir est amer, comme constatation .. c'était le meilleur des somnifères, avant que tu ne tues mon aptitude à jouir, seule ou avec toi.
Plus tard, je me réveille exceptionnellement à .. 9h30!
Je me fais un café très fort, et ma fille cadette m'appelle, me proposant d'aller au parc de la Tête d'Or avec elle et sa petite fille.
Je déclinerai d'abord, lui expliquant la situation, puis je me ravise car elle a laissé "la porte ouverte", mon amour de fille! Je lui laisse un sms lui disant que je suis la dans une demi heure.
Et miraculeusement, je retrouve toute l'énergie nécessaire pour prendre ma douche, et me préparer en moins de vingt minutes, sauter dans la voiture et me diriger vers la Cité internationale, m'y garer, et traverser à pied le parc jusqu'à l'enclos des biches!
Je suis bizarrement faite. Je sais mettre un point d'arret à la souffrance, car je ne la supporte tout simplement pas.
Pendant toute la promenade, je serai souriante, optimiste, savourant la lumière et la douceur de l'automne.
Je décidé de ne plus penser aux anniversaires, ni aux deadline, ni de penser que le temps m'est compté. Sinon on ne vit plus.
j'ai décidé que ça prendrait le temps qu'il faudra, mais tu me reviendras, ou bien je t'oublierai.
Stigmates du chagrin .. comme j'ai changé en trois mois! tout comme j'avais changé, en mieux, l'année dernière.
Narcissique, j'ai fait un "photorécit" de mes plus belles photos de ces trois années .. Pour l'illustrer, je cherche des musiques, des chansons ..
Pour l'instant je n'ai trouvé que celle là "Que serais je sans toi" de Jean Ferrat ..
Si avec tout ça, ces folies, je ne lache pas prise moi aussi .. Toucher le fond et remonter.
Me souvenir que l'affront qu'il m'a fait est irréparable, m'avoir laissée au bord de la route comme un chien perdu et sans appel ni regrets.
Mon chagrin a égaré ma raison, mais je vais la retrouver, avec ma dignité, même si j'ai du mal, tant de mal à abandonner celle que j'étais pour toi, il faut que je me dise que c'était un personnage, que je jouais un role dans le but fallacieux d'exister davantage ..