Dernier volet de la trilogie, j’étais comme le canard à qui on a coupé la tête mais ne le sait pas et court toujours, sauf que pour le canard cela dure moins longtemps.
Pendant cette longue route écourtée par la canicule, chaque tour de roue m’éloigne de celle que j’étais, alors que je crois rouler vers une vie meilleure ; en me relisant un an plus tard, j’ai pitié de moi, de mon manque de clairvoyance, et de mes illusions ..
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Samedi soir, rentrée à Lyon depuis quelques heures, je tombe de fatigue, 1330 km plus loin, et avant hier encore j’étais dans ses bras, et j’ai fait tant de route depuis !
Un peu déçue de n’avoir pas de mail, enfin si, j’en ai eu un, mais d’un autre lecteur de mon blog qui me prodigue ses consolations et encouragements. Dommage, il a un train de retard, car je suis forte de ces heures divines passées avec lui, et ses assurances pour l’avenir, septembre , etc .. Je veux qu’il fasse le premier pas et je ne lui écrirai pas avant!
Mais revenons à hier matin.
Dans la nuit, j’avais décidé de ne pas aller à St Flour, du moins y dormir trois nuits ! trop de canicule, et surtout j’avais vu qu’une fois de plus, damned ! j’avais oublié le chargeur de mon pc portable, enfin c’était juste bizarre d’oublier une seconde fois, après le coup de Prague tellement mortifiant !
Donc oui canicule, comment passer trois nuits sans la clim sans internet, trois jours dans le cagnard, surtout que je voulais faire des marches - dont l’ascension du Puy Mary?
Je fais ce que mon intuition me dicte, en ce moment elle est bonne - le matin du vendredi, après un charmant petit déjeuner devant la piscine à l’ombre du patio, j’emmène mon pc expirant à l’accueil pour demander le mot de passe et la connexion (impossible dans les chambres) et ni une ni deux, j’annule la réservation aux Cantal Cottages sans le moindre regret !
Et puis, je ne suis plus très bonne en tourisme du terroir, seule, vite ennuyée par la campagne, un passage par la bas sera bien suffisant ! c’était bon, ces vieux plaisirs, pour « avant toi » !
Ce sera la journée des deux fois 50 kilomètres de trop !
Déjà en démarrant ver l’A8, me voilà sur la direction de Nice, en fait, j’ai raté la bretelle Aix, ou elle n’existe pas ! du moins pas où je l’attendais.
Avant ça, j’avais tenté une incursion vers sa rue, tant qu’à faire -mais je n’ai rien rencontré de l’itinéraire Mappy ! Et le soleil était déjà chaud, il y avait du monde. Ce qui compte, c’est emprunter son trajet quadri quotidien, plutôt que de découvrir sa maison de lotissement, sûrement bien protégée des regards, en plus. C’est sa vie bien réglée, les déjeuners obligés avec madame, sa cage dorée et je la lui laisse bien volontiers ..
Donc, deux sottises pour commencer mon périple, et ce ne sera pas la dernière !
Jusqu’à Alès tout se passe bien et mon moral remonte, mais au rond point de sortie, que vois je sur la droite ? « Barjac » c’est indiqué ! normalement situé sur ma route.
Peu rassurée, je crois pourtant à l’écrit, erreur ! Mon intuition me disait que Barjac était sur la gauche, et là c’est sur la droite ! Je m’enfonce dans une campagne plate et déprimante, et je sais bien que je me trompe, il doit y avoir un autre Barjac !
Effectivement, arrivée dans ce bled paumé du .. Gard qui n’a rien de lozérien, la préposée de l’OT me dit que je suis la troisième personne à m’être trompée cette semaine !
Il n’est que 16h30, mais elle me dit qu’il y a deux heures quarante de route par 134 kilomètres de petites routes par 37 degrés …
Je suis prête à renoncer, on téléphone à l’hôtel Paradis, qui refuse d’annuler la réservation, bien gentiment et c’est normal, le soir même !
Je dis que je vais réfléchir, et repars .. car je n’ai pas envie de rentrer dès ce soir.
Après tout cela ne fait que deux fois 25 kilomètres en plus, ce qui porte à 100 le total des erreurs depuis ce matin, sans parler du détour inutile à S.
Et me voilà repartie, j’ai envie quand même de revoir le Cantal, et de passer la nuit dans une vraie auberge rustique, avec le restaurant du soir et la fraîcheur escomptée de la nuit ..
Merci la route ! pendant deux heures elle monte en lacets, elle monte toujours, sans redescendre, parmi un magnifique paysage de sapinières vallonnées, les gorges du Tarn ne sont pas loin, le thermomètre annonce 38 degrés, la clim fonctionne à fond.
Enfin, j’arrive à bon port, peu avant Marvejols.
Le « café tabac restaurant hôtel » Paradis est à l’entrée du village, que je parcourrai de fond en comble avant de découvrir la grosse maison sans enseigne visible, cachée derrière les arbres !
La patronne me donne la 312, troisième étage sans ascenseur. Je décide de ne pas monter la grosse valise, j’y prend juste quelques affaires, et le sac Lulu.
La jeune femme qui m’avait eue au téléphone a pris le relais et m’accueille gentiment, j’ai l’impression de la connaître tant elle évoque mes cousines auvergnates (dans l’idée que je m’en fait) : son accent chantant, un air de madone, un menton un peu en galoche mais des beaux yeux noirs et toujours le sourire, c’est la bru de la dame un peu revêche de tout à l’heure, qui discute avec les habitués du bar. Un instant j’imagine sa vie.
Je descends à 19h45, le repas étant servi à partir de 19h30 et la brunette ouvre pour moi, évidemment toujours la première pour aller manger ! – l’immense salle de restaurant bien rustique avec la cheminée et les photos d’autrefois, les pierres et poutres apparentes, les tables déjà dressées ..
Elle me rassure, je ne resterai pas seule longtemps ; c’est confirmé, la salle est bientôt comble, c’est une affaire qui marche à 13 euros le menu, vin compris !
Mon repas durera près de deux heures tant le service est lent ! mais je ne les vois pas passer, j’observe mes voisins, leur embonpoint, leur beaufitude grégaire souvent, mais aussi un mignon jeune couple d’amoureux, encore minces, beaux et romantiques tout en étant diserts.
Moi je m’en fiche d’être seule, je ne suis pas jalouse hier encore j’étais avec mon amoureux, même si c’est tellement fragile et qu’il est marié .. Et je sais d’instinct me tenir droite, parce que j’ai bien fait l’amour, la veille : notre histoire, elle est repartie sur les chapeaux de roues, c’est évident.
L’entrée : aubergine farcie et salade de tomates et laitue avec olives noires, et pour la suite, je choisis une truite meunière, avec sa patate et ses haricots verts, puis la brunette m’apporte le plateau de fromages dont j’abuse et je finis par un vacherin vanille framboise avec meringue, du surgelé Pilpa mais très bon!
Entre temps j’ai sacrifié au vin de café, mis en bouteilles ouvertes, comme à la Salette.
A 21 h je fume ma cigarette dehors, enfin au frais, j’ai mangé lentement donc tout est bien passé, il n’est pas encore temps de trop m’inquiéter de ma ligne, je me donne une semaine de liberté totale, je l’ai bien gagnée !
Je passe une excellente nuit, rêvé de Thierry mais je ne me souviens plus !
Le matin, réveil dans la fraîcheur après un intermède nocturne où j’ai pu contempler le ciel étoilé de la mi-août.
DIX HUIT
9h - Petit déjeuner un peu compassé dans une salle fermée avec tous ces gens, on doit se passer la verseuse de café, mais je suis si bien, si contente de mon périple écourté et surtout des folies de la veille que je ne me formalise pas ! Je me sens femme, pleinement et pour un temps indéterminé - et je suis bien plus cool quand j’ai fait l’amour il y a peu ! (mégère apprivoisée comme il disait).
Dans la voiture, le thermomètre annonce déjà 18 degrés, et dans l’après midi ce sera .. 38 !
Je profite de ces dernières heures de relative fraicheur sur la belle route qui passe de la Lozère au Cantal. Arrêt forcé à Marvejols pour prendre de l’essence (encore !) mais occasion de quelques belles photos « vieilles pierres et bête du Gévaudan « !
Je n’ai pas vu de vaches Aubrac, à peine quelques Salers, mais je crois qu’en raison de la canicule, la plupart des éleveurs les tiennent à l’étable.
Sapins toujours, leur odeur, et aussi .. l’odeur des loups : oui quand je passe devant la réserve des loups du Gévaudan, ça sent le fauve !
Je pense à l’oncle du même nom, et à mon père aussi, quand toute la famille était la.
J’ai réuni dans un même voyage, mes nouvelles amours et mes racines les plus anciennes. Bonne et belle idée, qui me portera chance je l’espère ..
Me voici en fin de matinée à Saint Flour, après un détour au Viaduc de Garabit. Il est du même rouge que le pont du 25 avril.
Je passe devant le Cottage Hôtel, où j’aurais du dormir, qui aurait pu être coquet sans une proximité avec la route nationale et l’absence totale d’ombre ! les jolis cottages genre motel étincellent sous le soleil de plomb, à réserver pour une autre saison, car c’est tout à coté de la ville basse et on y est vite.
Depuis 10 ans, la « banlieue » a bien changé, encore d’autres magasins de chaînes, ateliers, garages .. et la crise alors ? c’est pareil autour des petites villes que j’ai traversées, l’offre me semble démentielle par rapport à la demande supposée, mais je dois avoir tort, puisque cela existe !
En revanche la ville haute est toujours pareille, même le parking du champ de foire est resté gratuit, ce à quoi je ne m’attendais pas. Je me balade avec plaisir dans les rues avoisinant la rue des Lacs, très et trop touristique, ces rues sont délicieusement sombres et fraîches, désertes, avec juste quelques « boutiques obscures » modianesques et tellement improbables.
Je fais plusieurs fois le tour, photographiant une porte ancienne, des façades Renaissance, des reflets cassés dans les vitres à petits carreaux, un vrai moment de grâce comme j’ai pu en connaître avant tous ces tumultes du cœur ..
Et puis le bonheur serein d’avoir retrouvé – une marche après l’autre - « quelque chose » avec Thierry me submerge. C’est un nouveau départ, oui, après ces trois merveilleuses rencontres !
C’est la fin du marché, je veux acheter une part de gâteau régional à une joviale vendeuse, qui propose tout le lot à deux euros, mais c’est trop pour moi ! Pour la moitié, elle me donne un grosse part de « pompe aux pommes » et en surplus, une tripotée de beignets à moitié écrasés ! elle ne plaint pas sa marchandise, c’est gras et délicieux ! heureusement tout est dans un sac plastique et je pioche dedans avec gourmandise tout en me baladant.
Je fais l’effort de « rendre » sa carte postale à mon frère qui m’en a envoyée une, renouant avec une tradition bien oubliée. Je me sens généreuse, aimante, normale. Grâce à toi, mon Ange..
Havre de frais dans l’abbatiale du XVème, comme c’est bon ! au passage je remercie St Antoine et son enfant Jésus, pour tout ce qu’il a fait pour moi, depuis mes prières de Lisbonne (dont il est le saint patron) qui ont porté leurs fruits ! Cet Antoine de Padoue, grand voyageur en son temps, est présent dans la majorité des églises.
Je prends un café derrière le théâtre (oui il y a un théâtre ici, façon classique mais peint en saumon et vert amande, à l’italienne), que j’accompagne en douce de plusieurs morceaux de beignets (tout s’est brisé et mélangé dans le sac, la pompe aux pommes et les beignets!)
Ensuite il y a eu Murat, puisque je l’avais dit, on ne peut pas faire l’impasse sur tout ! hélas, la ville est en pente, mais il n’y a pas grand chose à visiter, c’est vite fait, les ruelles sont désertées à cause de la chaleur intense. L’église ND de Haute Auvergne, dont la statue blanche surplombe la ville, me permet de récupérer, un mariage s’y déroulera, tout est déjà prêt et je les plains sincèrement de se marier par cette chaleur ! (trop bu, trop mangé, et les costumes de mariages difficiles à supporter !)
A l'Intermarché (climatisé) du coin, j'achète des spécialités roboratives, pour l'hiver ..
Ensuite je rejoins l’autoroute A75, en m’apercevant et d’une qu’elle est gratuite depuis Montpellier, et de deux qu’on est un samedi, jour de retour des locations de vacances, et donc assez chargée ! on roule au pas mais on roule.
Je fais quand même une halte, et je décide de sortir à Issoire, enfin voir cette fameuse église du 12eSt Austremoine, dont les vives couleurs romanes me font envie !
En effet, elle est superbe car on a restauré les couleurs d’origine, et je prends de belles photos, un autre mariage s’y déroule.
J’hésite à couper par les petites routes en direction du Puy, je vais encore me perdre .. et puis après Clermont, il n’y aura plus les parisiens sur l’A75 et la voie sera libre.
Ce qui s’est révélé exact, mais comme c’est long !
Je m’aperçois que je n’aime plus faire les circuits en voiture, c’est toujours plus rapide dans ma tête qu’en réalité, et il me semble que ma voiture bouffe trop d’essence (clim à fond ? pneus mal réglés ?)j’ai utilisé deux pleins et demi pour faire 1350 km. Cela me semble beaucoup, et tous ces péages aussi ! Je préfère nettement l’avion et le train, et aussi, cela me limite dans les bagages, toujours bien trop conséquents quand je pars en voiture!
Je n’ai mis que deux tenues, et utilisé très peu de choses, alors que je n’ai pas été fichue d’emporter mon chargeur : je vais mettre un mot dans la valise noire pour y penser toujours !
Après la sortie 6 de Feurs, il reste encore presque 100 km par des routes tortueuses, peu avant 20 heures je suis enfin chez moi, la dernière épreuve étant de monter les bagages. Rien, aucun message de mes proches, mais tant pis, je savoure ce que j’ai vécu, avec Thierry on se retrouvera, ce n’est pas la première fois qu’il me fait le coup de ne pas écrire (à par le sms) comme s’il avait honte de ses élans .. je le comprends mais bon ..
Il fait encore presque 40 degrés et ça va durer plusieurs jours, j’ai vraiment horreur de l’été !
Envie de voir personne, de rester chez moi à classer et rapetisser mes photos Pentax trop lourdes, écrire le récit de cette rencontre décisive, exprimer mes doutes, mes débuts de doute, oui, la machine infernale s’emballe ! et pourtant, comment aurait il pu feindre ? me mentir ? faire semblant de tout ?
Et pourtant il y a des mots qu’il ne me dit plus, des choses qu’il ne me fait plus, ou pas encore ? je crains alors que je n’ai pas de raison réelle de craindre .. l’avenir s’annonce vraiment bien, tout a été réussi au delà de nos espérances, la vie est belle et New York m’attend !
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